* Attention, les images de cet article peuvent être choquantes *
Quand on prépare son voyage en Australie, on lit partout que les premiers kangourous qu’on verra seront morts sur le côté de la route. C’est vrai. Parfois on les sent même avant de les voir… Mais ça ne veut pas dire qu’on ne peut rien faire pour autant.
Premièrement, on peut rouler moins vite… Ca évitera certains accidents, car ce sont des animaux qu’on voit au dernier moment. Toujours.
Deuxièmement, si on ne peut pas s’empêcher de rouler vite, on ne roule pas. Ou en tout cas pas entre le crépuscule et l’aube, car c’est là qu’ils sortent le plus.
Troisièmement, si on en voit un mort sur le bord de la route et si l’endroit est suffisamment dégagé pour se garer en sécurité, on s’arrête.
Ce qu’il faut savoir avec les marsupiaux, c’est que l’embryon se développe dans le ventre de sa mère, puis le bébé naît et remonte vers la poche qui va l’accueillir pour les prochaines semaines ou les prochains mois. Il est alors minuscule, mesure quelques centimètres, aveugle et sans poils. Mais il n’est plus dans le ventre. Contrairement aux autres mammifères, les bébés marsupiaux peuvent donc survivre quelques jours après la mort de leur mère !
C’est valable pour tous, même si forcément, plus l’espèce est de petite taille, plus les chances de survie du bébé si une femelle est percutée par une voiture sont faibles. Ca concerne donc les kangourous, wallabies, koalas, possums, wombats, diables de Tasmanie, etc. Par contre pour ne pas se tromper, il faut aussi savoir que chez les wombats et les diables de Tasmanie, la poche est dirigée vers l’arrière.
En s’arrêtant pour vérifier qu’il n’y ait pas un bébé, on peut alors sauver une vie alors que les deux avaient été condamnées par un abr*** qui roulait trop vite, et certainement avec un pare-buffle pour ne pas avoir besoin de faire attention (attention à sa voiture bien sûr, pas aux animaux).
Et si on ne sauve pas une vie sur le moment, le simple fait d’éloigner la carcasse de la route peut sauver la vie des charognards (oiseaux, dingos, renards) qui viendront se nourrir dessus.
Depuis que je suis en Australie, j’ai dû m’arrêter une quinzaine de fois pour des kangourous. La plupart du temps je suis tombée sur des mâles. Difficile de trouver un bébé dans cette situation… Et les rares fois où c’était une femelle, elle n’avait pas de petit. Sauf une, dont le bébé était déjà bien grand et mort à côté d’elle.
De quoi se décourager, mais il faut continuer car malheureusement de nouveaux accidents arrivent tous les jours.
C’est comme ça que je me suis arrêtée une énième fois avant-hier, et que j’ai trouvé un bébé vivant !
Avantage : ça m’a forcée à faire une pause toutes les heures pour lui donner à boire.
Inconvénient : l’odeur… Je ne sais pas depuis combien de temps la mère était morte, mais l’odeur s’était bien imprégnée sur la fille.
Inconvénient bis : je l’ai trouvée au milieu de nulle part (autre formule pour dire « en Australie ») et je l’ai gardée 12 heures pour la déposer à 800km de là où je l’ai récupérée. Heureusement qu’elle n’avait « pas vraiment » besoin de soins d’urgence…
La caméra était préparée pour ça et j’ai donc filmé le sauvetage. Mais au cas où la vidéo serait censurée par YouTube, ou si vous ne vouliez tout simplement pas la voir, rapide résumé de ce qu’il s’est passé.
Comme un autre mâle que j’ai trouvé un peu plus tôt, ce kangourou était encore en partie sur la route, et le passage des voitures avait eu raison de sa tête. J’étais ravie d’aller voir… Pas de doute sur le fait qu’il était mort donc, et en m’approchant j’ai constaté que c’était une femelle et que des pattes sortaient de sa poche !
Premier coup au cœur, car à l’odeur j’étais persuadée que le petit serait mort aussi. Jusqu’au moment où je l’ai entendu « cracher » en signe de défense car j’étais un intrus et il ne comprenait pas ce qui faisait bouger la poche de sa mère. Visiblement il a également bougé, mais il y avait tellement de vent que je n’ai vu ça qu’en regardant la vidéo.
J’ai donc éloigné le corps de la route pour ne pas sacrifier le petit le temps d’aller chercher ce dont j’avais besoin pour le récupérer. Car j’ai un kit de secours pour ce genre de situation depuis que j’ai acheté la voiture ou presque.
Difficile d’y voir clair dans la poche à cause du soleil, et il semblait y avoir pas mal de sang à l’intérieur. Le problème est que je ne savais pas si c’était le sang de la mère ou du petit, et je ne savais pas comment le manipuler sans le blesser encore plus. Jusque là, je voyais surtout du sang sur ses oreilles et j’avais peur que la tête soit touchée, ou qu’il soit en train de mourir et que je doive l’achever, et je ne sais absolument pas comment faire ça… Deuxième coup au cœur.
Dans le doute, je n’ai pas voulu le tirer hors de la poche et risquer d’aggraver les choses, et il a donc fallu la découper. En le sortant j’ai réalisé qu’il avait une très grosse entaille dans la patte avant droite, que je pensais même cassée, et que sa queue était coupée. Vite emballé dans sa nouvelle poche, j’ai déplacé le corps de sa mère loin de la route et je suis partie. Première priorité, garder le petit au chaud et attendre qu’il se calme pour voir s’il supporte le voyage. De toute façon, je n’avais pas d’autre solution.
Ironie du sort, j’ai appris 100km plus loin que j’aurais pu le déposer à la police si j’avais fait 200km dans l’autre sens… Mais je ne voulais et ne pouvais pas revenir sur mes pas, pas pour cette distance en tout cas. Ce qui en soi était certainement une erreur, car j’aurais été capable de récupérer un autre bébé si je n’avais plus eu celui-là, et j’ai culpabilisé de ne pas pouvoir m’arrêter pour la vingtaine de kangourous qui suivaient… Finalement, je crois que je préfère tomber sur un mâle.
Quoi qu’il en soit, après environ une heure contre moi sur mes genoux, il était déjà beaucoup plus calme. J’ai pu essayer de lui donner de l’eau, car je savais qu’on avait beaucoup de route à faire. Il était complètement déshydraté ! Heureusement qu’il était suffisamment grand pour boire seul, car je n’ai pas encore réussi à me procurer de tétine spéciale kangourou. Et je suis vraiment impressionnée par l’instinct des animaux, car il n’avait jamais bu comme ça de sa vie et il a compris comment faire en quelques secondes.
Pourquoi je ne lui ai pas donné de lait ? Parce que je n’avais pas de lait pour macropode, et que le lait de vache est mortellement toxique pour eux qui sont intolérants au lactose. Je lui ai donc donné de l’eau régulièrement pendant tout le trajet, et après quelques heures il paraissait assez calme et éveillé pour que je nettoie la plaie de sa queue, qui était coupée nette mais était pleine de larves de mouches…
Par contre, au bout de deux heures il a fallu que je le suspende dans un sac, car il semblait aller mieux et commençait à bouger dans tous les sens, et ça allait devenir compliqué de le garder sur mes genoux. Je ne le savais pas encore mais il me restait donc presque 10h de route, et je ne voulais pas que le sac suspendu se cogne partout dans la voiture, donc je l’ai soutenu tout le long en gardant la main dessous… Collection de crampes dans la main et le bras.
Après 800km et de nombreuses difficultés pour trouver quelqu’un pour l’accueillir, je l’ai finalement déposé à Esperance. Pour apprendre hier qu’il n’a pas passé la nuit… J’espère que les prochains auront plus de chance. Dernier coup au cœur.
Comment te dire… Bravo ma biche pour ce que tu as tenté et pour ton dévouement. Cela force l’admiration et le respect.
Et l’émotion est là à la lecture de ton article vraiment très réaliste et très poignant. Une vraie leçon de vie.
Grand courage à toi pour la suite de ta vie au service des animaux quels qu’ils soient, comme tu nous le prouves encore une fois.
Des milliers de gros bisous ma chérie. ❤
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RESPECT SOPHIE !!!
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c’est tellement triste… Mais franchement, tu as vraiment énormément de courage pour faire ça !
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tu as déjà tout tenté et surtout tu as fait preuve de sang froid. Même si la fin est triste l’histoire est belle et je ne pense pas que beaucoup de personne se serait donné autant de mal que toi! tu ne peux que être fière !
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Oh là là c,’est génial ce que tu as fait Soso !!! Il aurait peut-être fallu que tu aies de quoi le nourrir dans ta voiture mais tu as fait avec ce que tu avais et tu peux être fière de toi !!
Ce qui me choque dans cette histoire ce sont les camions qui te croisent sans vraiment freiner, sans s’arrêter pour te demander si tu as besoin d’aide…. comme si tu n’étais pas au bord de la route….
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Il a beaucoup freiné, et je ne pensais pas qu’il le ferait. Mais il leur faut plusieurs kilomètres pour s’arrêter donc c’est impossible pour eux, ils sont trop lourds.
Quant à la nourriture, je ne veux pas avoir de lait pour eux avec moi. C’est du lait en poudre qu’il faut garder au frigo, il y en a 4 ou 5 différents en fonction de l’âge ce qui obligerait à avoir un gros stock juste pour la variété, il faut connaitre le poids du petit et il faut pouvoir chauffer le biberon facilement. C’est juste impossible dans la voiture.
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terrible histoire et triste fin! J’espère que la prochaine opération de sauvetage aura une issue heureuse; ton engagement est vraiment très impressionnant.
PS: chauffer les biberons dans une voiture se fait bien sur l’allume cigare (s’il y en a un); par contre le frigo…
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Oui mais ça impliquerait d’acheter en plus un chauffe-biberon… Ca commence à faire beaucoup et à prendre beaucoup de place
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Bravo ma fille !
Te voilà une fois de plus humanitaire de la cause animale.
Ton intervention spectaculaire est tout à ton honneur, même si tes efforts n’ont pas suffit in fine à remettre en ordre un accident de la vie.
Poursuis ton voyage dans ton samu à roulettes dans les meilleurs conditions que tu puisses trouver et pense aussi un peu à toi.
Grosses bises de « ton » papa.
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Énooooooorme !!!!!! juste Bravo !!!!
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